Après avis favorable du Conseil constitutionnel, la loi travail a été promulguée le 9 août dernier. Bon nombre des mesures qu’elle contient n’entreront en vigueur qu’après parution de décrets. Néanmoins, un certain nombre sont d’ores et déjà applicables.
Forfaits en heures et en jours
Selon la loi travail, les accords collectifs autorisant les forfaits annuels en heures ou en jours conclus depuis le 10 août dernier doivent désormais contenir deux nouvelles clauses :
- une clause définissant la période du forfait (12 mois consécutifs pouvant correspondre à l’année civile ou à une autre période) ;
- une clause déterminant les conditions de prise en compte des absences, des arrivées et des départs en cours de période pour la rémunération des salariés (Code du travail, art. L.3121-64, nouveau).
Par ailleurs, lorsque le salarié en forfait jours renonce à une partie de ses jours de repos en contrepartie d’une majoration de salaire, la durée de validité de l’avenant déterminant le taux de cette majoration est désormais limitée à un an, et cet avenant ne peut plus faire l’objet d’une reconduction tacite.
Enfin, aux termes de l’article 8 de la loi, l’employeur est désormais tenu de s’assurer régulièrement que la charge de travail du salarié soumis à une convention de forfait en jours est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail.
A cet effet, l’employeur et le salarié doivent échanger périodiquement sur la charge de travail de ce dernier, l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sa rémunération, ainsi que sur l’organisation du travail dans l’entreprise (art. L.3121-64, II nouveau du Code du travail).
Salariés à temps partiel
Le code du travail prévoyait déjà qu’un salarié à temps partiel pouvait bénéficier d’une réduction de sa durée de travail en raison des besoins de sa vie familiale. Désormais, ce terme de « vie familiale » est remplacé par le terme moins restrictif de « vie personnelle ».
Salariés saisonniers
La disposition selon laquelle le chômage des jours fériés ne peut entraîner aucune perte de salaire pour les salariés qui totalisent au moins 3 mois d’ancienneté dans l’entreprise est étendue aux travailleurs saisonniers qui, du fait de divers contrats, successifs ou non, cumulent une ancienneté totale d’au moins 3 mois dans l’entreprise.
Transport routier
Désormais, l’inspecteur du travail est habilité à infliger lui-même des amendes administratives aux employeurs qui ne respectent pas les dispositions suivantes :
- dispositions relatives aux durées de conduite et aux temps de repos des conducteurs ;
- dispositions réglementaires ou conventionnelles relatives à la durée maximale du travail, à la durée maximale de conduite, aux repos et au décompte du temps de travail.
Congés payés
Afin d’éviter d’avoir à attendre, parfois jusqu’à un an, pour pouvoir bénéficier de ses premiers congés payés, un salarié peut désormais prendre des jours de congés « dès l’embauche » (et non plus dès l’ouverture des droits comme auparavant).
Néanmoins, ceci n’est possible que dans la mesure où la période de prise des congés est ouverte et sous réserve de respecter l‘ordre des départs en congés fixé par l’employeur.
Exemple : jusqu’ici, un salarié embauché le 1er avril devait en principe attendre l’ouverture des droits à congés, soit le 1er juin dans le cas général. Désormais, ce salarié pourra prendre des jours dès le 1er mai suivant si la période de prise des congés dans l’entreprise est fixée du 1er mai au 31 octobre
Par ailleurs, le droit à des jours supplémentaires de congés, qui était réservé jusqu’ici aux mères de famille ayant des enfants de moins de 15 ans à charge, est étendu à tous les salariés (y compris les pères donc) qui ont des enfants à charge de moins de 15 ans et/ou un enfant handicapé quel que soit l’âge de celui-ci.
Congés pour événements familiaux
Depuis le 10 août, le nombre de jours de congés pour décès d’un enfant est porté à 5 au lieu de 2.
Par ailleurs, le droit d’absence pour décès du conjoint ou du partenaire de PACS passe de 2 à 3 jours et il est étendu au décès du concubin.
Ce droit est également porté à 3 jours, au lieu de 1 seul jusqu’ici, en cas de décès du père, de la mère, du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur.
Enfin, il est institué un droit à 2 jours de congés en cas d’annonce de la survenue d’un handicap chez un enfant.
Congé de proche aidant
L’ancienneté minimale requise pour pouvoir bénéficier du congé de proche aidant est ramenée de 2 ans à 1 an.
Par ailleurs, alors qu’il était jusqu’ici de 15 jours, le délai de prévenance que doit respecter le salarié vis-à-vis de son employeur est supprimé en cas de :
- dégradation soudaine de l’état de santé de la personne aidée ;
- cessation brutale de l’hébergement en établissement dont bénéficiait la personne aidée ;
- situation de crise nécessitant une action urgente du proche aidant.
Protection de la mère et du père d’un nouveau-né contre la rupture de leur contrat de travail
Jusqu’ici une salariée qui reprenait son travail à l’issue d’un congé de maternité ne pouvait être licenciée durant une période de 4 semaines à partir de cette reprise (sauf pour faute grave non liée à sa maternité ou sa grossesse, ou par suite d’une impossibilité de maintenir son contrat).
Depuis le 10 août dernier, cette période est portée à 10 semaines au lieu de 4 et son point de départ est repoussé, le cas échéant, au retour de congé de la salariée, lorsque celle-ci a pris des congés immédiatement à l’issue de son congé de maternité.
Enfin, cette période de protection relative de 10 semaines est étendue au père d’un nouveau-né et elle débute pour lui à compter du jour de la naissance de l’enfant.
Lutte contre le sexisme et le harcèlement moral ou sexuel
Désormais, les règles de preuve du harcèlement, tant moral que sexuel, sont alignées sur celles applicables en matière de discrimination.
Il en résulte un assouplissement pour le salarié, dans la mesure où celui-ci n’a plus à établir des faits, mais simplement à présenter au juge des éléments de faits laissant supposer l’existence du harcèlement.
Par ailleurs, l’employeur est tenu désormais à une obligation de prévention des agissements sexistes dans son entreprise et, quand il existe, le règlement intérieur doit non seulement rappeler les dispositions légales relatives aux harcèlements moral et sexuel, mais également celles prohibant les agissements sexistes.
Enfin, l’article 122 de la loi étend désormais l’obligation faite au juge de condamner l’employeur au remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées au salarié dans les cas suivants :
- tout licenciement fautif lié à une discrimination ;
- lorsque le licenciement est frappé de nullité pour cause de méconnaissance des dispositions relatives au harcèlement moral ;
- en cas de nullité du licenciement d’un salarié ayant subi, refusé de subir ou témoigné d’actes de harcèlement sexuel.
En outre, cette obligation concernera également les licenciements de salariés de moins de 2 ans d’ancienneté intervenus dans les entreprises employant habituellement moins de 11 salariés.
Enfin, la nouvelle loi a également introduit un nouvel article au code du travail disposant que, lorsqu’un licenciement a été jugé discriminatoire, ou a pour origine le fait que le salarié a subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel, ou est lié à la maternité, le salarié ne demandant pas la poursuite de son contrat de travail ou dont la réintégration est impossible a droit à une indemnité minimale de 6 mois de salaire.
Cette indemnité est due, sans préjudice du paiement du salaire qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité et, le cas échéant, de l’indemnité légale de licenciement.
Source : Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, J.O. du 9.